Analyse #30 – Marc Sinnaeve – La participation invisible du grand orchestre médiatique (V) – Vendre du temps de cerveau disponible

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Dans ses nouveaux habits, taillés par les services audimétrie, marketing et compatibilité1, l’information pour le citoyen semble bien faire place à celle conçue pour le consommateur. C’est qu’aujourd’hui la viabilité de presque tous les médias2 dépend de la publicité et de ses dividendes financiers. On ne peut mieux résumer la mise au pas du secteur de l’info et du journalisme par les logiques du marché que ne l’ont fait les politologues Corinne Gobin et Pierre Verjans3 : « Par cette forte distorsion commerciale, les deux mots d’ordre principaux de ce secteur sont devenus faire acheter et divertir, et ces deux modes d’intervention auprès d’un public de plus en plus considéré comme une masse de consommateurs tendent à devenir la nouvelle définition de ce qu’est informer et être informé. » L’info est un produit qui est vendu deux fois. Une fois au public et une fois aux annonceurs, dans une proportion variable selon les pays. Parfois, les annonceurs représentent 60 à 70 % des recettes des ventes. Ce qui place les dirigeants de médias, en particulier les éditeurs de la presse écrite, en position de dépendance. Cela signifie-t-il qu’ils soient amenés à s’interroger sur l’opportunité de ne pas diffuser un sujet qui déplairait spécifiquement à tel ou tel annonceur, ou de modeler un produit d’information qui corresponde aux attentes des publicitaires ? Rarement. Les annonceurs ne s’intéressent pas au contenu des programmes, sauf, marginalement, lorsque l’image qui est associée à une émission, ou un contenu spécifiquement critique pourrait leur nuire.

 

Une analyse de Marc Sinnaeve, Professeur de journalisme et Militnant PAC

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