Analyse #34 – Marc Sinnaeve – La participation invisible du grand orchestre médiatique (IX) – Le journalisme peut-il traiter la complexité ?

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Les contraintes qui s’exercent sur le travail journalistique génèrent une valorisation toujours plus pressante du traitement événementiel de l’actualité. Sous cette lumière, celui-ci peut être appréhendé comme une sorte de parade, inconsciente, de la profession face à la complexité du monde. En raison des contraintes du traitement de l’événement à chaud, les journalistes sont amenés à cadrer celui-ci dans un angle souvent ultra resserré. Pour s’en sortir, ils vont avoir recourir spontanément au précédent, à l’analogie superficielle ou à l’explication fourre-tout. En tout état de cause, ils ne pourront pas déployer beaucoup de nuances ou de distinctions, dont la subtilité risquerait de toute façon de leur être reprochée par leur hiérarchie. D’autant que les stratégies éditoriales viennent redoubler les effets des contraintes originelles sur un travail journalistique souvent sans perspective ni rétrospective. Le plus souvent, dans les entreprises médiatiques, l’important est de transmettre aussi vite que les concurrents ; le message, ce n’est pas le contenu, c’est la force et vitesse de diffusion de celui-ci. Pour citer Edgar Morin : « L’urgence occulte l’essentiel alors que l’essentiel est devenu urgent. »

 

Une analyse de Marc Sinnaeve, Professeur de journalisme et Militnant PAC

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