Atelier d’écriture Ose écrire • Et maintenant, osons lire !

Régionale : Brabant wallon   Categories : Non classé

Retrouvez quelques uns des textes écrits par les participantes et participants de l’atelier d’écriture Ose écrire. Les textes sont publiés avec l’accord de leurs auteurs et autrices respectives.

Atelier d’écriture du 25 janvier 2024

Consigne : Quelle est l’expression de la jeune fille ? Que pense-t-elle ?

Par Véronique

Je suis jeune
Je suis belle
Et pourtant juste servante

Je suis jeune
Je suis belle
Et pourtant obéissante

Je suis jeune
Je suis belle
Et pourtant éternelle

Mon visage à traverser les siècles
Mes grands yeux ronds, envieux
Mes lèvres secrètes, entrouvertes
Mon regard familier, amoureux

C’est cette perle offerte
Qui me fait ainsi rayonner
Ce foulard or et bleu de Delft
Justement bien dosé

Moi la servante obéissante


Atelier d’écriture du 15 novembre 2023

  • Consigne 1 : « Je vous parle d’un temps… »

Chacun, chacune choisit une des photos et raconte l’histoire de la personne qui y figure / une histoire mettant en scène la personne sur la photo.

Les Siens, par Marion

Seul, au milieu des champs, Jean est assis à même le sol et s’active. Pleinement engagé dans sa communauté agricole. Dévoué ? Non, seulement conscient que son action est bénéfique pour les Siens. Les Siens ne se limitent pas à sa famille, les Siens sont les 36 membres de sa communauté villageoise, dont il est presque le doyen. Cernier est actuellement son père de 15 ans son aîné.

Oui, mais que fait-il là, toute la journée depuis plusieurs semaines, à s’écorcher les mains sous un soleil de plomb ? sa veste négligemment jetée sur le tas de cailloux à côté de lui, sa pelle en attente d’être saisie avec vigueur. Aucun panier posé près de lui contenant sa pitance du mitan.

Il casse, fracasse, concasse, réduit à rien, égraine les moellons affleurant le champ. Il n’économise pas sa peine car il sait que dans peu de jours le champ sera retourné pour être ensemencé par les Siens. Des semences d’avoine, qui à terme seront récoltés en août, triés, réduits en farine et transformée en pain pour les villageois. Nourrir le village, tel est son concours à la vie de sa communauté, telle est la raison de son acharnement pour que son labeur profite à la saison agricole des Siens. Le pain sera partagé chaque jour de l’année dans chaque chaumière quand Louis le boulanger aura transformé cette farine avec l’art dont il est garant.

Jean ne ressent pas encore la fatigue car ce n’est encore que la matinée et cependant ses mains calleuses et vigoureuses sont déjà meurtries malgré son savoir-faire. Quand la lassitude de ce mouvement répétitif l’aura gagné, il prendra le temps de charger sa brouette pour charrier des briquaillons jusqu’à la route qui mène au village. Le charroi sera facilité toute l’année.

Pour lui, ce n’est que du bonheur d’être là.

Léontine, par Benoît

Edith Piaf le chantait: « Moi j’essuie les verres au fond du café. J’ai bien trop à faire pour pouvoir rêver. Et dans ce décor banal à pleurer, il me semble encore les voir arriver. » Oui, ça est vrai. Mais je n’ai pas encore vu de couple d’amoureux arriver en se tenant par la main !

C’est pas plus mal ! Je me souviens de tous ces pottes peyes qui venaient chez Jefke après l’usine. S’ils avaient du arriver avec une Maria, ça aurait été du joli !

Non, depuis que j’ai quitté le caberdouche de Jefke, je suis beaucoup plus heureuse ici. Léonske est un chouette pey. Il me donne mes sous chaque semaine et même de temps en temps une petite dringuelle. Irène, sa femme est une forte femme. Elle tient la caisse. Et pas question qu’un de ces castards ne paie pas, hein! Elle roule des yeux et appelle son Léon. Le client refuse jamais de payer!

C’est Irène qui m’a fait engager ici. Elle a souvent vu ma mère dans le tram 56 et alors, elles se sont mise à causer ensemble. Mère lui a parlé des joyeux zwanzeurs de chez Jefke et que ça était difficile pour moi, sa fille, Léontine.

Irène est venue en cachette avec Léon et ils m’ont commandé chacun une gueuze. Je les ai servis, ils ont bu leur bière et sont partis. Et ils ont fait la même chose jusqu’au dimanche. Et le lundi, Irène à vu Mère dans le tram. Elle lui a raconté ce qu’elle avait fait avec Léon et a demandé que je passe au soir dans leur estaminet.

La semaine d’après, j’étais derrière le comptoir à laver et essuyer les verres. J’aime bien laver ces verres. L’eau chaud et le savon. Quand je les essuies, ils blinquent comme au premier jour. Je suis bien ici.

Et puis, il y a Jos. C’est un client. Il est déjà venu quelques fois et il prend toujours une kriek. Il est gentil, Jos. Toujours poli et aimable ! J’espère qu’un jour il va m’inviter au bal. C’est bientôt le 21 juillet. J’aimerais aller danser avec lui au Vieux marché !

  • Consigne 2 : « J’aurais voulu être un·une… »

Inventez une biographie où vous avez suivi un autre chemin, une autre carrière, un métier ou une activité que vous auriez rêvé d’exercer.

La tête dans les étoiles, par Christophe

J’arrive au soir de ma vie. Voici venu le temps du bilan. Ai-je été une bonne personne ? Suis-je parvenu à être heureux ? Quelle trace vais-je laisser en ce monde ? Comment se souviendra-t-on de moi ?

Un nom parmi une liste, dans une notice Wikipedia. La belle affaire !… Pourtant… Lauréat du prix Nobel de physique, croyez-moi, je n’aurais pas osé en rêver, même de loin, du temps de mes études. Des équations, des calculs, je sais : quand on voit ça sur un tableau, on peut difficilement imaginer qu’il y ait comme une aventure en chemin. Une quête. Un Graal. Pourtant, nous en rêvions toutes et tous, sur les bancs de l’Université. Peut-être même encore avant cela, lorsque, enfant, je pointai mon premier télescope, reçu à l’occasion de mon onzième anniversaire, vers le ciel étoilé. Résoudre le mystère de l’Univers. Comprendre enfin… tout ! Trouver LA théorie qui permettrait de tout expliquer. L’infini ramassé dans une longue et belle équation…

J’ai essayé. Toutes ces années, j’ai essayé, essayé, et encore essayé. Peut-être même ai-je moins vécu que je ne l’aurais pu, emporté dans ce tourbillon de cordes. Oui, de cordes. La théorie des cordes, je suppose que vous en avez tout de même entendu parler, non ? Bref. Je n’ai pas résolu le mystère. Pas trouvé la clé. J’ai fait avancer la recherche. Apporté ma modeste contribution, ajouté ma petite pierre – pardon : ma petite corde – à l’édifice. Levé une toute petite partie du voile, si vous voulez. Rendu une petit peu moins opaque une portion de la nuit dans laquelle nous avançons en aveugles depuis que l’humanité a levé les yeux vers la voûte céleste. On a même jugé que cela méritait de m’attribuer ce diable de prix. Ce n’est pas rien. Mais cela ne peut pas être tout. Je ne serai ni Newton, ni Einstein. Les pas que nous effectuons aujourd’hui semblent minuscules comparés à ces géants. Je reste malgré tout, si pas fier, au moins satisfait de ce que j’ai accompli. D’ailleurs, ça aurait pu être pire : j’aurais pu devenir animateur socioculturel.

J’aurais voulu être, par Marion

Montagnarde solitaire, des hauts sommets de notre belle planète. Surmontant la fatigue des muscles, les maux du corps, le souffle à bout, l’inquiétude de se perdre, de ne pas arriver à destination ou d’être surpris par une intempérie. Parvenir à tracer la route de col en col, à joindre mon corps en mouvement à la paix intérieure qui petit à petit s’amplifie, au plus l’altitude augmente. Synchroniser la vibration qui pulse au-dedans avec l’espace immédiat. Se sentir faire partie de cette ample Nature, réelle et singulière. Ce grand Tout qui m’absorbe, où mon corps, gonflé d’énergie et de fatigue, s’intègre progressivement. Cet espace-temps qui me rend si intimement vivante pourrait être le lieu accueillant de ma dépouille, si je parvenais à en faire le choix. Quitter les Siens, choisir cette majestueuse sépulture pour y enfouir ma singularité. Pour l’éternité, avec joie et dans la paix.