[Retour sans filtre] ** Bring them back !

27 novembre 2019 - Categories : Actualités

// A l’issue de la plupart des rencontres-débats organisée par PAC, Barbara Mourin, coordinatrice de la générale et des campagnes, revient avec ce qui l’a marquée pendant les deux heures de débat qui ont précédé. Un retour à chaud, subjectif et sans filtre.

Bring them back !
Rencontre-débat du 19 novembre 2019

Tant pis pour toi, qui n’es pas venu.e.
Tant pis pour toi, qui n’a pas pu, su souhaité être parmi nous.
Tu n’as pas eu le privilège de t’asseoir, te taire et écouter.
Parce que face à de tels témoignages, il n’y a, dans un premier temps, rien de mieux à faire.
Les deux fils de Yasmeen Albaldah sont partis combattre en Syrie, en 2013.
Bien avant leur départ, elle a alerté les autorités. En vain.
Et aujourd’hui, pour avoir envoyé à ses enfants de quoi survivre, elle est accusée d’avoir soutenu un réseau terroriste.
Elle n’a pas de mots pour dire l’horreur que lui inspirent la guerre, la violence, le terrorisme.
En aucun cas, jamais, elle ne cautionne.
La fille de Nadine Rosa Rosso enseigne dans l’école où étudiait le fils cadet de Yasmeen, qui n’avait que 16 ans lorsqu’il a pris la route avec un ami de classe, âgé de 15 ans.
« J’aurais aimé te rencontrer dans d’autres circonstances », a dit hier Yasmeen à Nadine.
Je ne peux qu’imaginer à quel point ce souhait est puissant.
Ensemble, depuis de trop longues années, elles mènent avec d’autres mères et grand-mères un combat pour la justice : que leurs enfants et petits-enfants puissent revenir en Belgique.
Bring them back.
Bernard Devos, Délégué Général aux Droits de l’Enfant, les soutient de longue date dans leur combat, contre vents et marrées, contre la surdité du monde politique et contre les raccourcis toxiques de certains médias.
Il est allé sur place, dans les camps de détention où « vivent » des enfants, dont une soixantaine de belges.
Dans le silence de l’écoute, je me suis projetée, comme mère.
Comment tenir, quand ne reste que la vie nue ?
Je suis bouleversée et impressionnée, par tant de dignité.
La dignité de la parole de Yasmeen et celle du silence de cette autre femme, anonyme, mais dont le destin de mère a été lui aussi brisé dans de pareilles circonstances.
J’ai la gorge nouée d’apprendre qu’en 2013, certain.es parmi nos élus louaient le courage des jeunes qui partaient combattre Bachar, en Syrie. Il a même été dit qu’un jour, un hommage leur serait rendu, comme aux combattant.es des brigades internationales parti.es combattre le franquisme.
En 2013, un pic de départ de jeunes belges vers la Syrie a été observé…
Dans le silence de l’écoute, je me suis questionnée, en tant que militante.
Pourquoi le monde politique résiste-t-il à l’absolue nécessité de rapatrier ces enfants et leurs mères, comme l’a lui-même souligné le porte-parole de l’OCAM ?
Même les « raisons de sécurité » ne font pas le poids face à la peur et le besoin de rassurer l’opinion publique ?
Parce qu’il est malheureusement inutile de préciser que les motifs humanitaires n’ont que peu de poids dans cette situation : il n’est pas question de rapatrier des mineur.es détenu.es dans des conditions inhumaines, mais de réintroduire sur notre territoire de potentiel.les terroristes. Ils ne sont plus des enfants. Plus dans le regard de celles et ceux qui se retranchent derrière la peur, qui les aveugle au point de ne plus défendre la démocratie et l’Etat de droit.
Pace que c’est bien de cela qu’il s’agit : la défense de notre Etat de droit, lorsque même l’injonction de la justice ne fait pas flancher l’Etat.

Il a fallu se séparer, après cet échange.
Il a fallu rentrer, chacun.e chez soi.
J’ai mal dormi…
Tant pis, et surtout dommage pour toi, qui n’est pas venu.e hier soir…
Si tu veux soutenir celles et ceux qui, sans relâche, demandent que leurs enfants puissent revenir en Belgique, tu peux t’informer : bring them back, via un célèbre réseau social.
Tu peux aussi, via ce même réseau, contacter Nadine Rosa Rosso, qui te dire où acheter le livre que Yasmeen Albaldah a écrit.
Des petites choses, un peu de soutien.
Mais essentiels, quand ne reste que la vie nue.
Bring them back.

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Il était un homme libre qui disait
De tenir debout dans le vent.
Comme elle est belle la lune quand elle s’élève
Rejoindre la rumeur du printemps!
Mon poème n’a pas de mot,
Il va au rythme du flot
Du sang qui coule sous ta peau.
Je prendrai deux bouts de bois entre mes doigts,
Je les porterai en flambeaux.
Je réchaufferai la terre et cueillerai
Le chagrin d’hiver des oiseaux.
Mon poème n’a pas de mot,
Il va au rythme du flot
Du sang qui coule sous ta peau.
Vole le chagrin des oiseaux
Vers la ville de Homs et ses lambeaux.
Vole le chagrin des oiseaux,
Quand l’hiver enneige nos plateaux.
Comme elle est raide la côte,
Comme elle est haute
La cime de l’arbre dans le ciel blanc!
Si ta douleur est profonde, quand la nuit tombe
Moi, je m’allongerai dedans.
Je coucherai sous la terre, à l’abri de la lumière,
Tes larmes qui rejoindront la mer.
Il était un homme libre qui disait
De tenir debout dans le sang
D’attraper la foi sauvage des sorciers,
La rage pour tenir longtemps.
Mon poème n’a pas de mot.
Il a le son du tonnerre
Et de son éclat sur la pierre.
Vole le chagrin des oiseaux
Vers la ville de Homs et ses lambeaux.
Vole le chagrin des oiseaux,
Quand l’hiver enneige nos plateaux.

Emily Loizeau, Vole le chagrin des oiseaux


Le choix rédactionnel de ce texte est l’écriture inclusive, selon les règles suivantes :

  • le point médian (ex : intervenant.es)
  • les pronoms mixtes (ex : iels pour ils et elles)
  • le doublement des termes (ex : ceux/celles)